Comment trouver un livre par sa couleur

Je cherche un livre: sa couverture est bleu. Ah. Et même mieux: la couverture est bleu et je l’avais vu dans la vitrine l’année dernière. Il est disponible dans la librairie? À ce point, j’en savais déjà davantage, ce n’était pas le cas de demander à la personne qui se tenait en face de moi si elle connaissait l’auteur ou le titre du livre. D’une part car si elle les savait elle me l’aurait déjà soufflé, d’autre part car je sais bien que même si l’on note ces informations, la plus part du temps elles sont incorrectes. Mon exemple préféré: une demande pour Le Monde d’en bas était la réélaboration subjective de La Terre vue du ciel de Yann Arthus-Bertrand. Ce n’est pas un saut extrême, si vous considérez les titres qui peuvent être à côté de ce texte. Cependant, quand les options de recherche étaient limitées aux mots contenus dans le titre ou au nom de l’auteur et ne contemplaient pas la matière de l’œuvre – cela se passait avec les anciens ordinateurs qui exécutaient des vieux programmes DOS encore sans accès à internet – on devait compter sur une pensée bien créative, non-linéaire, et oui, même magique. Si le livre était encore en version imprimée et en stock, et si le libraire qui l’avais mis sur l’étagère n’était pas un idiot complet (comme le libraire qui rangé un étude sur le livre biblique de Job dans la section dédié aux « affaires »), j’aurais pu le trouver. Et la plupart du temps, j’y arrivais. Dans un magasin avec plus de cent mille titres en stock et une liste de livres qu’on pourrait commander en millions de copies, il faudra bien connaître les livres. Même si c’est évidemment impossible de connaître tout et par couleur.

Donc, on recommence à nouveau. Je suis à la recherche d’un livre, sa couverture est bleu. D’ailleurs, je ne fais pas trop de confiance même pas dans l’évocation des souvenirs sur la couleur –trop de livres «bleus » se sont révélés rouges ou verts ou d’une autre couleur qui était tout sauf que du bleu. Alors, ma première question, normalement, est: « Est-il un roman ou la littérature non-romanesque?» Il faut faire attention puisque que cette question parfois va déclencher un débat qui se pose le problème si un livre est vrai – comme s’il contient les mensonges ou il raconte la vérité dedans- et il ne vaudrait point la peine de contrebattre (bien que je n’y résiste jamais) qu’il y a beaucoup de vérité à trouver dans un roman ou, en général, dans la littérature et que si quelque chose n’est pas romanesque (l’actualité, l’histoire, mémoire, biographie, politique, philosophie ou religion), cela ne signifie pas nécessairement qu’elle contient la vérité – plutôt cela signifie simplement que ce n’est pas de la littérature romanesque, point.

Si ce que l’on est en train de chercher se révélait un roman, alors on commencerait par se demander s’il pourrait s’agir d’une nouveauté, c’est-à-dire un des derniers livres publiés, mais encore une fois il faut faire attention parce que la conception qu’on libraire a d’un livre « nouveau » c’est très différente de celle retenue par un consommateur. La dernière année que j’ai travaillé en libraire, en 2003, aux États-Unis on publiait un peu plus de 300 000 livres. L’année dernière, ce nombre a augmenté à plus de 1 million et peut-être on arrive à trois millions si on compte les auto-édition et les e-books. Par contre, la France et l’Italie publient 60 000 livres, à peu près, par an. Une librairie dispose d’un espace d’exposition limité, en outre, après 3 mois si un livre ne vend pas bien il est rendu à l’éditeur. Il n’y a pas de pénurie de livres à lire, personne ne pourra jamais tout lire, c’est pour cela qu’il faut bien choisir les livres qui vraiment méritent.

Au contraire, si ce que l’on est en train de chercher se révèle appartenant à un genre particulier, alors il faut enquêter un peu plus : s’agit-il d’un roman littéraire, d’un polar, d’un livre pour les poules, ou c’est de la Sci-Fi, autre chose? Encore, on passe aux renseignements d’état civil du livre: pays, ville, siècle, langue d’origine. Voyez-vous comment petit à petit vous pouvez raffiner la recherche, le processus de pensée?

Enfin, si ce que l’on est en train de chercher avait à faire avec la littérature non-romanesque, alors on pourrait avoir la chance d’écouter le client ajouter qu’il s’agit d’un beau livre.. d’architecture, ou d’art, ou de photographie, ou cuisine… Ainsi vous voudriez poser des questions comme : pouvez-vous me dire un peu plus sur le sujet ? Savez-vous de quoi s’occupe précisément se livre? Pourtant je ne vous conseille pas d’entamer avec ces questions car le client pourrait se sentir un peu embarrassé, mais aucune inquiétude: une fois que vous aurez raffiné la recherche de manière autonome, le client sera moins accablé et consentira de vous faire confiance en vous aidant à conduire la recherche et à devenir le livre qu’il désire. Puis dirigez le client à la section arrangée pour la matière en question et cherchez directement par étagère. Pour quelque raison que je n’ai jamais vraiment compris, les gens font plus confiance dans les ordinateurs plus qu’en ce qui est là, physiquement devant leurs yeux (les livres sur les rayons) ou dans les fichiers de ma tête. Toutefois, il n’y a rien d’autant impressionnant que d’écouter d’une demande absurde et vague comme «vous savez, le livre qui parle de quelque philosophie asiatique, mais il est vraiment vieux et sur les affaires – mais je ne sais pas l’écrivain ou titre… » et sans un mot placer L’Art de la guerre de Sun Tzu dans les mains de celui qui a formulé l’énigme.

Maintes fois, deviné et trouvé le livre – parce qu’en général je réussissais dans l’entreprise – le livre ne s’avérait pas bleu ou il avait un titre tout à fait différent par rapport aux souvenirs du client – et finalement on me regardait avec étonnement. C’était mon boulot. Et ce n’est pas quelque chose que Amazon, ou n’importe quel grand magasin en ligne, peut faire. Il faut un contact humain et une connaissance profonde de la librairie et la mémoire des positions et des déplacements des bouquins. Le cerveau humain permet ce type de connexions et fait jouer la pensée créative.

La librairie où je travaillais était spécialisée dans les éditions avec une grande renommée dans le domaine de art et de l’architecture, pour cette raison elle était fréquentée par des designers, alors il était bien possible que la demande d’un livre bleu, était simplement la demande d’un livre commandé en vertu de la couleur de sa couverture: des livres par couleur. Une grande partie de notre clientèle comprenait des architectes, des dessinateurs ou des photographes en quête de livres à acheter selon leur couleur et taille pour remplir une maison, un bureau ou réaliser un photo shoot.

Le jour où cette requête est arrivée, on a sélectionné tous nos livres préférés, un pour chauque couleur: My French Kitchen, Oranges and Lemons, Miro, les livres d’éditions Europa… Ces livres ont été acheté en raison de leur couleur, on ne saurait jamais si quelqu’un les a jamais lu après, le même mystère envoûte chaque livre vendu.

Charity Bliss

tradotto in italiano da Laura Testoni: Come trovare un libro in base al suo colore

translated into English by Charity Bliss: How to find a book by its color

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